Lorsque j’ai commencé mon défi créa, c’était en grande partie pour l’absence de recyclage sur l’île sur laquelle je vis en ce moment : Cozumel. J’ai été frappée par la prédominance des déchets dans les rues et sur les plages et frustrée de ne pas pouvoir trier, ce qui m’a poussé à analyser comment je pouvais revaloriser ce que je jetais – que ce soit le papier, le plastique, le textile, le verre et le métal – mais aussi à investiguer comment se gérait la collecte sur l’île.
Les déchets dans le périmètre d’une île
Je l’ai déjà dis mais le fait de vivre sur une île, on est obligé d’être directement confronté à la problématique des déchets. D’une part parce qu’à l’échelle d’une île, il faut trouver où les mettre de façon à limiter la contamination, mais aussi parce qu’on se retrouve nez à nez avec le problème, contrairement à vivre dans une ville ou à la campagne où les déchets sont emmenés très loin de nous, de façon à les oublier très rapidement.
Pour une île qui possède un parc marin protégé et un tourisme de masse qui génère la plupart des revenus, j’ai été sidéré de voir que la question de la gestion des déchets n’était pas très prise au sérieux. Il n’y a pas un service municipal de collecte très efficace, et très peu d’initiative individuelle de nettoyage.
Partout où je vais, je vois des déchets dans la rue et notamment du plastique ce qui me préoccupe grandement étant donné notre proximité avec la mer.
Sur la plupart des bateaux de plongée, activité normalement consciente des enjeux environnementaux, on en est encore à distribuer des centaines de petites bouteilles d’eau aux plongeurs, ce qui génère une consommation de plastique considérable. “Les touristes américains trouvent cela plus hygiénique”, est la réponse qu’on me donne lorsque je râle. Heureusement, il y a quelques centres qui ont eu l’esprit de fournir des gourdes réutilisables aux clients, tout n’est pas perdu !
Puisqu’on parle d’eau, au moins il y a une chose que j’apprécie, ce sont les fontaines à eau pour remplir ses bidons de 20 litres d’eau à un prix dérisoire, limitant la consommation de bouteilles en plastique. Ouf !
Le recyclage à Cozumel
Il n’y a pas de culture du tri à Cozumel. Du moins, au niveau de la collecte. En revanche, j’ai découvert qu’il y a avait bel et bien des centres de gestion des recyclables.
Je suis allé voir cela de plus près et il s’agit d’entreprises privées qui compactent les matériaux de type plastique, métal, aluminium et carton avant de les envoyer par bateau sur la côte pour suivre leur processus de recyclage, car sur l’île il n’y a pas l’équipement pour. Il y a aussi un tri de tous les composants métalliques, informatiques, de matériel électroménager, moteurs, pneus et autres gros objets…
En revanche, ces entreprises ne s’occupent pas de ramasser les recyclables. Ce sont des locaux roulant en tricycle qui se chargent de trier les poubelles en plongeant les main dedans, à la recherche de ces matériaux pour les emmener au lieu de compactage quelques kilomètres plus loin.
Pourquoi ? Parce que ces déchets ont une valeur au kilo. Pas grand chose, mais cela peut représenter une somme suffisante pour alimenter sa famille si on le fait quotidiennement et plusieurs fois par jour.
J’ai même entendu dire qu’il y avait des endroits où l’on pouvait échanger des recyclables contre un repas.
Donc ce n’est pas trop mal dans le sens où les gens sont incités à récupérer ces matières et en tirent un revenu, mais cela serait encore mieux si chaque foyer pouvait faciliter le travail et trier.
Visite de la décharge de Cozumel
Oui je sais, ça fait rêver ! C’est pas le circuit touristique habituel sur une île des caraïbes ! Mais bon, il vont où tous nos déchets ? C’est quand même bon de le savoir !
La collecte est grandement gérée par une entreprise privée, la PASA, qui emmène tout ce beau monde dans une décharge située de l’autre côté de l’île, sur un terrain à environ 1 km de la côte. Avant l’arrivée de la PASA, la décharge n’était qu’un terrain vague où les gens jetaient tout n’importe où et n’importe comment. Si bien que cela venait jusqu’à la mer. Il n’y avait aucun contrôle et il y avait beaucoup de feux. Vref, un joli bordel.
La PASA est une entreprise mexicaine qui gère les déchets dans plusieurs villes mexicaines et est arrivée il y a 5 ans sur l’île avec un projet de gestion des déchets sur 20 ans, avec à leur disposition un terrain de 25 hectares, divisés en une quinzaine d’aires de plus où moins la même taille.
Au départ, ils ont dû effectuer un grand travail de nettoyage, pour réunir tout les déchets en vrac en un lieu, en séparant les déchets carbonisés des autres. L’installation est assez bien pensée pour ne pas contaminer les sols ou les alentours.
Avant d’y déverser les déchets, ils mettent une sorte d’immense bâche en plastique dur pour imperméabiliser, recouvert d’une couche de graviers pour protéger cette membrane et qu’elle ne se déchire pas. Les terrains sont inclinés et munis d’un système de tuyaux pour récupérer le liquide provenant des déchets en un seul endroit.
Les déchets sont ensuite déversés puis compactés par des genre de tracteurs rouleaux compresseurs de 20 tonnes qui passent dessus, avant d’être recouverts de graviers, terre ou argile. La limite de hauteur est de 18 mètres… Quand même !
Les arbres autour ont été coupés pour limiter les risques de feux, et les aires en cours d’utilisation sont munies de murs en armature de lit pour empêcher une bonne partie des sacs plastiques de s’envoler.
Quant au jus de poubelle récupéré, il est reversé sur la décharge dont une partie sera re-filtrée et un autre… Évaporée dans l’air.
Cette année en revanche ils ont commencé un projet de bassins de 2 m de profondeur pour filtrer ce liquide et le rendre moins toxique pour qu’il soit accepté par le traitement des eaux de l’île. Cela consiste à remplir un bassin de ce liquide qui va ensuite passer au second puis au troisième suivant un système de cascade (oui, charmant je sais), ce dernier bassin contenant le produit qui sera confié aux traitement des eaux, après vérification du niveau de toxicité.
Côté chiffres, la décharge accueille environ une tonne de déchets par jour, soit 300 par mois, je vous laisse faire le calcul par an. Si cela vous parait beaucoup, j’ai appris que la ville de Tijuana recevait quotidiennement la quantité d’un mois entier de Cozumel. Oui, ça fait un peu flipper !
Honnêtement, visuellement je m’attendais à pire. Après avoir vu le film français Super Trash, j’avais un peu peur d’y aller. Étant donné que tout est recouvert et compacté, voire avec de la végétation qui repousse dessus (la nature me surprendra toujours…), cela n’a pas l’air si horrible.
En haut du tas de 18 mètres…
En revanche, en voyant les bords on voit très clairement les déchets les plus longs a se dégrader: le plastique (qui met environ 400 ans), le métal (qui met entre 50 et 200 ans selon le type), et le verre (qui peut mettre plus de mille ans !). Si bien que la hauteur ne diminue pas de plus de un ou deux centimètres par an.
D’ailleurs c’est simple, selon leurs estimations seulement 7% des déchets récoltés ne sont pas valorisables. 43% sont d’origine organique (vive le compostage s’il vous plait !!) et le reste est soit recyclable soit revalorisable.
Ces petites visites étaient fort intéressantes, c’était d’ailleurs la première fois que je visitais une décharge. J’en ai appris beaucoup et cela me motive encore plus à porter le message de réduction des déchets, car leur vie ne s’arrête pas sur nos trottoirs. Ils sont soit enfouis, soit incinérés ce qui n’est pas mieux, voire pire car toutes les substances toxiques se retrouvent dans l’air.
Quant au recyclage, c’est une façon d’aider mais cela ne doit pas être une excuse pour consommer plus, car c’est un processus difficilement traçable, non universel et non infiniment déployable.
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Et toi, as-tu déjà visité une décharge ?
Voilà qui est comme toujours, très intéressant ! Je ne savais pas du tout comment étaient gérés les déchets, alors c’est vraiment bien de lire cet article. Cela m’a permis de comprendre réellement ce qui se passe derrière mes poubelles, car même si je suis en France, je suis certaine que ce n’est pas très différent. Donc merci beaucoup d’avoir pris le temps de visiter cette décharge pour nous, ça donne à réfléchir, comme toujours… (la piscine de jus de poubelles, OMG !)
Merci ma lili!! Ouais la piscine fait vraiment pas rêver. On leur a suggéré de mettre une échelle au cas où quelqu’un tombe dedans.. Yuuuk! Mais bon c’est la triste réalité et c’est bon d’en avoir conscience. J’irai ptet voir ce qu’il en est à mon retour en France. T’imagines, je pourrais ptet développer le concept de tour du monde des décharges… Ça vend moins du rêve tout de suite!
Très intéressant, merci pour l’article!
Je reviens tout juste de mon voyage au Mexique et comme nous tous j’ai été frappé par les déchets. D’abord l’absence de tri, mais surtout l’omniprésence des déchets chez les gens, dans leur propre jardin. Bien entendu leur situation fait que la gestion des déchets n’est pas leur priorité, pire ils font totalement partie de leur vie. J’en ai parlé autour de moi, et c’est apparemment tout simplement intégré dans leur culture, personne ne remarque plus rien. J’ai vu pas mal de landfills fait maison, quelques arbres abattus à la sortie d’un village et des couches de déchets brûlées pour laisser place aux suivantes.
J’ai été frappé par la plage de Puerto Morelos où les morceaux de plastique sont déjà tellement petits.
Néanmoins les choses semblent changer, les bouteilles en plastique ont commencé à être collectées, des panneaux de sensibilisation à la protection de l’environnement fleurissent près de la côte du Quintana Roo.
Certaines personnes sont déjà très engagées, dont notre guide de plongée Sergio Sandoval Vizcaíno à Cozumel (qui a d’ailleurs ramassé des morceaux durant notre initiation).
Il y a aussi beaucoup à faire en amont, je n’ai pas trouvé une seule poubelle publique sur la plage de Puerto Morelos, j’ai jeté les déchets que je ramassais dans la poubelle d’un restaurant (en espérant qu’ils y restent…). La distribution de sac en plastique là encore, ne parlant pas espagnol ça a été difficile de me faire comprendre lorsque je tendais mon sac en tissu, idem pour ma paille en inox.
Je comprends que ça ne doit pas être facile pour toi de faire tes courses sans emballage, à part les fruits/légumes et la fleur de Jamaica je n’ai rien trouvé sans emballage.
Merci pour ton commentaire, cela me fait très plaisir que tu partages ton expérience mexicaine! Effectivement, la gestion des déchets n’est absolument pas la priorité, mais ça vient doucement avec les questions environnementales auxquelles ils commencent à se sensibiliser du fait du tourisme. Espérons que ça bouge, j’y travaille!
Avec quel centre de plongée as-tu plongé? Comment c’était?
Je n’ai pas encore de paille en inox (ce sera mon prochain gadget zero waste), mais je me contente du « sin popote por favor » à chaque fois que je commande une boisson (après avoir jeté un oeil sur les tables pour m’assurer qu’ils les servent dans des vrais verres ;) ). Pour les courses en vrac, ce n’est pas évident, mais au marché de Cozumel, je trouve quand même des légumineuses et céréales en vrac! ouf!
Je n’y connais rien et je n’ai aucune idée de ce que devienne mes déchets. Comme j’ai du mal à voir ce que je pourrais faire sur cet étape du processus, je fais attention chez moi.
Mon quartier sert de test pour le compostage. Enfin ça c’est le beau discours. des composteurs ont été installés il y a 2 semaines et sont toujours sous clé…
Mais du coup je suis maintenant curieuse d’en savoir plus. Surtout que j’ai remarqué qu’il y a beaucoup de déchetterie de tri dans le secteur.
Oui moi non plus je ne sais pas trop, et comme toi je les limite au max justement parce que je ne sais pas trop où ça va. Mais quoi qu’il en soit, c’est soit incinéré soit enfoui donc limiter reste le meilleur choix selon moi! J’espère que le compostage fonctionnera bien, au moins l’initiative est là :)