Bénévolat : exploitation moderne ?

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Oui, je sais : le titre est fort. J’ai fait beaucoup de bénévolat dans ma vie. Et j’ai travaillé avec des bénévoles. Donc ce texte est le témoignage de ce que je peux voir, de ce que je peux ressentir, de ce que je peux analyser du fait de donner de son temps pour une cause. Cela apporte énormément, mais si on fait pas attention cela peut prendre aussi beaucoup.

Pourquoi j’aime le bénévolat ?

Je vais commencer par le positif du bénévolat :)

J’ai commencé à faire du bénévolat pour deux raisons principales :

  • Pour agir pour la cause qui résonnait avec moi : la planète
  • Pour me former sur le terrain en vue de continuer dans cette voie

Cela m’a énormément apporté. La confirmation que je voulais me dédier à ça, un réseau de personnes engagées, la sensation d’enfin faire quelque chose de vraiment utile et impactant, faire partie d’une famille de valeurs.

Cela m’a aussi permis de faire des expériences inédites : nettoyer des fonds marin en plongée, participer à un earthship, monter une chorégraphie avec un Panda et la faire devant la tour Eiffel, connaître des plantes médicinales, apprendre la permaculture, fabriquer des meubles en palettes, aller chercher des graines dans la forêt colombienne, participer à des festivals de musique.

Et bien sûr, cela m’a fait grandir professionnellement. En dehors de bénévolat de « terrain » et de la dimension humaine, j’ai aussi fait du bénévolat de compétences : rédiger des études, des supports de formation, des articles, gérer des bénévoles…

Et oui, j’ai aimé ça. Si c’était à refaire, je referai tout pareil :)

Cependant je fais aussi des critiques, qui sont vraiment personnelles et très liées à mon caractère et ma difficulté à poser des limites.

Est-ce que le bénévolat, c’est de l’exploitation ?

Je me suis posée cette question lorsque c’était à mon tour de solliciter l’aide de bénévoles. Bizarrement, une partie de moi se sentait coupable de me reposer sur une aide non rémunérée.

Il y a plein de types de bénévolat, et très différents. Dans l’associatif, l’aide bénévole est cruciale. Mais dans les plus petites, elle est indispensable. Elles en dépendent beaucoup. Je trouve ça magique qu’une association tourne uniquement avec des bénévoles. Et c’est admirable, tout ce temps et cet investissement donnés par des centaines de personnes.

Certains bénévolat ont une contrepartie (un événement, un logement, une valorisation de compétence, parfois une indemnisation), et d’autres se font vraiment dans l’ombre.

Et d’un côté, dépendre de l’activité bénévole peut-être dangereux. Le bénévolat étant volontaire, il n’y a aucune obligation contractuelle. De plus, cela pousse parfois à en demander beaucoup aux bénévoles pour répondre aux besoins et aux engagements de certaines associations. Des personnes qui font parfois tellement de travail, que oui, je pourrais dire que c’est une forme d’exploitation moderne, justifiée par la cause. Il y a clairement des manques de moyens en face de besoins importants, comblés par du travail non rémunéré.

Je ne dis pas que le bénévolat c’est mal. Je pense en revanche qu’il faut faire attention à poser ses limites, parce que ça peut nous avaler.

Les femmes sont-elles plus sujettes à être bénévoles ?

On ne va pas se voiler la face, dans la défense des causes, il y a une majorité de femmes. Sans doute parce que culturellement, elles ont plus développé la capacité à vouloir aider. Dans le milieu bénévole aussi, il y a beaucoup de femmes. Oui, il y a aussi des hommes, mais parmi les bénévoles que j’ai pu voir en souffrance, il s’agissait plus de femmes que d’hommes.

Mais je ne vais pas généraliser, je vais parler de mon expérience. Je remarque que j’ai du mal à dire non quand on me demande de l’aide. Pire, j’ai même tendance à offrir mon aide gratuitement quand quelqu’un me parle de ses besoins. C’est plus fort que moi et c’est très chiant. Parce que je me retrouve après à en faire trop et à ne plus savoir quand dire stop. Je culpabilise de laisser quelqu’un en galère alors que j’ai la compétence (ou le temps) de l’aider. Et j’ai tendance à faire des problèmes des autres mon problème.

Régulièrement, je me dis : maintenant j’arrête. Et dans la journée qui suit j’ai dit oui. C’est systématique. Alors je m’interroge. Je me demande si ce n’est que moi, ou si le fait d’être une femme y est pour quelque chose.

Pourquoi ça le serait ? Parce que historiquement, je pense qu’on est plus à même à travailler gratuitement. Pendant des années, les femmes ont géré la maison et les enfants sans contrepartie. C’était normal. On a développé une capacité d’attention, de soin aux autres, de pédagogie et de service. Aujourd’hui encore, les salaires ne sont pas égaux entre les hommes et les femmes sur des postes similaires et à compétences égales. On considère encore que la partie domestique nous est attribuée, même si c’est en train de changer.

Les femmes sont d’éternelles bénévoles.

Poser ses limites

Alors en soi ce n’est pas forcément le bénévolat qui est fautif, mais la manière dont on a de faire du bénévolat. Si je ne parle que pour moi, je sais que j’ai encore du boulot pour poser mes limites et mettre des priorités.

Pour bien vivre le bénévolat, il ne faut pas que ça nous coûte quelque chose. Cela doit rester un plaisir, une envie. Cela ne doit pas se transformer en travail déguisé, ni en souffrance, ni mettre en péril notre sécurité financière parce qu’on n’a pas le temps ou l’énergie de faire autre chose. C’est un plus, qu’on est en mesure de donner sans compromettre le reste.

C’est rester dans une démarche de développement durable pour soi, la cause qu’on défend et la structure que l’on aide.

Mais je crois que ce que je dis pourrais être applicable au monde du travail aussi. Sachant que là, c’est peut-être encore plus difficile car la rémunération justifie parfois de faire des heures à rallonge. Et là encore, les femmes doivent souvent plus faire leurs preuves et sont un peu attendues au tournant.

Je pense vraiment qu’il y a une part de mon caractère à vouloir en donner trop qui provient de cet héritage culturel.

Je ferai sans doute toujours du bénévolat, mais maintenant que j’ai cette conscience, je sais que j’ai grandement besoin de me fixer un cadre et de valoriser ce que je fais. Que je dois apprendre à dire non sans me sentir coupable. Et qu’en fonction des structures associatives et de l’expérience, parfois je dois apprendre à proposer mes services plutôt que de considérer normal de travailler gratuitement. Bon courage à moi ;)

***

Et toi, comment perçois-tu le bénévolat ?

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Planet Addict

A 24 ans, j'ai plaqué mon CDI pour partir voyager. Un voyage qui m'a emmené plus loin que ce que je pensais : il m'a ouvert des portes pour suivre mes rêves, m'engager à adopter un mode de vie minimaliste et plus éthique, et élever ma conscience. Depuis 6 ans je partage mon cheminement et mes changements d'habitudes de vie avec vous, en espérant planter des graines !

La publication a un commentaire

  1. De Gaetano

    Tu parles de deux sujets vraiment différents. Poser des limites est une question que nous rencontrons partout, tout le temps, avec tout le monde. Il est indispensable de les poser et de le faire dans les formes. On dit souvent que « ne pas savoir dire non, c’est ne pas respecter. » Rude, mais pas faux. Sans cela, pas de limites et la certitude de faire ou de promettre (sans les faire) des choses à contrecoeur. Pas terrible ! Pour ce qui concerne le bénévolat, j’en ai fait et en ferai encore. Alors oui, bien sûr, si ce n’est pas un moyen de se substituer à une activité marchande en regardant précisément ce qui est attendu et avec qui on va agir pour se sentir bien. Cela me semble nécessaire.

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